Hardanger, la fin .

Pour la fin de cette parenthèse norvégienne, je ne peux pas omettre de parler des trolls, de refaire un point sur la technique du Hardanger en proposant la réalisation d'une petite broderie. Impossible de ne pas compléter cette épopée sans revenir sur mes albums de la "bibliothèque DMC "et bien évidemment, sur la confection de la doublure de mon cartable qui est le "en cours" du moment qui s'achève aujourd'hui.

C'est re-parti,

✂ Le Hardanger, le pays des trolls...

Aujourd'hui, les trolls font intégralement partie de la culture et du folklore scandinave. Nous les retrouvons dans différentes oeuvres littéraires contemporaines comme "Le Hobbit "et "Le Seigneur des anneaux" de J. R. R Tolkien (première moitié de XXème siècle) ou plus récemment dans "Harry Potter à l'école des sorciers " de  J.K. Rowling. Dans les romans de Tolkien, les trolls sont des géants, puissants et particulièrement stupides, vivant dans des cavernes, amassant des trésors et tuants des hommes. Ils ont inspirés différents films, bandes dessinées ou jeux vidéo. Au contraire des trolls de Tolkien ceux de la "Reine des neiges" apparaissent comme des être surnaturels dotés de pouvoir dont celui de guérison et viennent en aide aux héros de l'histoire.

  Ces différentes représentation des trolls témoignent de l'évolution de leur place dans la culture scandinave. D'abord dieux vikings jusqu'au Moyen-Age, ils sont associés aux géants de la mythologie, à la magie et aux forces naturelles. Avec l'arrivée de christianisme, au Moyen Age, les trolls deviennent des créatures légendaires vivant dans les milieu hostiles: les montagnes, la mer, la forêt. Ils forgent les croyances populaires et appartiennent au folklore scandinave. Au Moyen Age, le terme "troll" est aussi utilisé pour désigner des personnes très grandes, ou anormalement fortes ou laides, des sorcières, ou des habitants de la forêt, des êtres malveillants ou des fantômes. Si dans la mythologie les trolls vivent dans le monde des géants, richement vêtus et parés de bijoux, dans les légendes du folklore scandinave, ils sont plutôt représentés comme des créatures solitaires, de taille géante, monstrueusement laids et habillés de peaux de bêtes ou de haillons. Ils deviennent les héros des contes et légendes scandinaves.

Leurs histoires se transmettent oralement d'une génération à l'autre. Au XIX ème siècle, un courant nationaliste romantique portant la sauvegarde de la culture et du folklore scandinave collecte ces contes et légendes. Il s'agit de laisser une trace, pour la postérité, de la mémoire des anciens. C'est en partie grâce à ce courant intellectuel que les trolls occuperont une place majeure dans la littérature et les arts scandinaves. Ils seront personnages de poèmes, de contes, de romans, mais aussi sujets de peintures, de dessins. L'illustrateur le plus connu est le suédois John Bauer (1882-1819) avec son livre de contes pour enfants "Parmi les gnomes et les trolls". Ces trolls sont grands, avec une grosse tête, un gros nez des bras noueux. Ils habitent une forêt mystérieuse et inquiétante. Ils sont plus naïfs que méchants. Cette représentation a servi de modèle au troll moderne et a inspiré l'art visuel et littéraire contemporain. 

"Holala, quel petit avorton ! 
S´exclama le troll." 
dans Le garçon qui n´avait jamais peur, 1912
(John Bauer)

Combien de trolls ont bien pu arpenter les montagnes du Hardanger?

Quittons, maintenant cette région norvégienne et ses trolls légendaires, pour  revenir à ce qui nous intéresse ici: la broderie Hardanger.

✂ La broderie Hardanger, une technique parmi tant d'autres.

La semaine dernière, je vous ai présenté deux albums DMC de ma collection d'ouvrages anciens.

Ils font partis d'un ensemble de publications destinées à faire connaître toutes sortes de travaux d'aiguilles. Dans les dernières pages, on retrouve la liste des différents recueils disponibles dans les merceries ou aux édition de Th. De Dillmont de l'époque: l'Encyclopédie des Ouvrages de Dames à laquelle j'ai déjà consacré un article, les albums de broderie au point de croix, Point de marque, Alphabet de la brodeuse (que vous pouvez retrouver ici), La broderie au passé plat, Alphabet et monogrammes, Motifs de broderie copte, une série de 5 albums de Motifs pour broderies contenant des planches colorées pour tapisserie et broderies diverses, La broderie sur Lacis, La broderie sur tulle, Recueil d'ouvrages divers, 1 série de 2 albums concernant les jours sur toile, Le tricot, Le crochet (3 albums), Le macramé, Le Filet brodé, Le Filet Richelieu, La Dentelle Renaissance, La Dentelle Ténériffe, la Guipure d'Irlande, Les Dentelles aux fuseaux et les Dentelles à l'aiguille. Autant de sujets que j'aimerais explorer ! Il va falloir chiner pour compléter ma collection de livres anciens !

         

En préambule, l'album DMC de Broderie norvégienne précise la nécessité d'utiliser un tissu dont les fils de trame et de chaîne aient la même grosseur et soient placés à égale distance les uns des autres. Nous allons donc respecter ce pré-requis pour nous assurer un résultat de qualité pour notre initiation à la broderie Hardanger. Petite leçon de point...

✂ Initiation à la broderie Hardanger

   

D'abord choisir le matériel. Moi j'ai pris un morceau de lin blanc, du coton perlé n°8 DMC blanc, une aiguille fine et de bons ciseaux.

Ci-dessous, le modèle que je vous propose de réaliser. Pour un premier entraînement, ce sera déjà une bonne approche de la broderie Hardanger...

La première étape se réalise à points lancés. Chaque point lancé recouvre 4 fils. Elle va permettre de réaliser les contours de notre partie brodée.

Pour éviter les noeuds, tenir le fil sur l'arrière (photo n°1) et broder en cachant le fil sous les points. Il s'agit maintenant de se concentrer: broder 5 points lancés horizontaux, puis 5 points lancés verticaux et ainsi de suite 4 fois pour faire le côté gauche. Il faut toujours que le premier point lancé d'une série parte du même trou que la série précédente.

Lorsque le côté gauche est brodé, faire une ligne de 5 points lancés, sauter 4 fils et refaire 5 points lancés. Au total sur la ligne, il y a 7 séries de 5 points lancés. Ensuite il faudra redescendre "en escalier" en brodant 5 points lancés verticaux, puis 5 points lancés horizontaux, quatre fois jusqu'au premier point réalisé.

Voilà à quoi ressemble l'arrière de notre travail:

Maintenant, nous allons réaliser les jours. Attention une erreur de découpe serait fatale, et le travail à recommencer !

Les découpes ne se font que perpendiculairement aux points lancés:

Couper 4 fils de trame. Puis avec l'aiguille, les tirer jusqu'à l'extrémité du motif et les couper bien au ras des points lancés.

Il faut de très bons ciseaux !

Cette opération est à renouveler entre chaque série de points lancés de part et d'autre du modèle. Entre chaque découpe, il reste 4 fils.

Puis la découpe sera réalisée sur les fils de chaîne de la même façon:

toujours le long des points lancés, couper 4 fils.

Les découpes sont terminées. Il reste 4 fils de chaîne qui croisent 4 fils de trame entre deux séries de points lancés.

Maintenant, nous allons broder les lignes de fils de chaîne et de fils de trame.

Pour cela, nous réalisons des "8 "avec le fil en passant au dessus de 2 fils puis au dessous des 2 fils des 4 fils de chaque ligne, puis retour au dessus, puis au dessous et ainsi de suite jusqu'à l'intersection des fils de trame et des fils de chaîne. L'intersection n'est pas brodée.

Pour passer d'un groupe de 4 fils à l'autre, il faut glisser le fil sous les points brodés sur l'envers de l'ouvrage. Cette technique permet aussi d'arrêter un fil terminé et de démarrer un nouveau fil sans faire de noeud.

Voilà, toutes les lignes de 4 fils de trame et de 4 fils de chaine sont brodés.

A gauche: le devant de l'ouvrage, à droite: le dos.

Pour améliorer le rendu de notre broderie, nous allons ajouter des points d'esprit dans les jours.

Pour cette étape, le départ du fil se fait au centre d'un jour, sur le bas. Emmener le fil vers le centre du côté droit du jour, et piquer de haut en bas (juste sur le bord et sur un seul fil), tirer le fil. Puis aller au centre du haut du jour et piquer de gauche à droite. Tirer le fil et diriger le, vers le côté gauche du jour. Piquer de bas en haut au centre et redescendre vers le point de départ. En croisant ainsi le fil, on réalise de petites boucles.

Comme à chaque étape, pour passer d'un jour à l'autre, faites passer le fil au dos de l'ouvrage, sous les fils brodés.

Notre broderie Hardanger est finie! 

Bravo, si vous êtes allée au bout.

Voici un schéma récapitulatif des consignes: place des zones de découpe, points lancés et point d'esprit.

Cette broderie Hardanger pourrait se retrouver sur une petite pochette:

Nous arrivons au terme de ce long article et pour clôturer ce chapitre consacré à la broderie Hardanger, voilà les photos de mon petit cartable doté de sa nouvelle doublure.

✂ Mon cartable en broderie Hardanger.

Après avoir découpé chaque partie dans ma cotonnade jaune, j'ai monté la doublure du rabat du cartable.

Je l'ai volontairement laissée dépasser. Il a fallu réaliser les boutonnières, ce qui n'est pas réellement ma spécialité.

Puis, j'ai assemblé et cousu les parties constituant l'intérieur du cartable.

Le montage de la doublure intérieure est fait. Il ne reste plus qu'à réaliser la couture, bien au bord.

Mon cartable est terminé!

Je remercie ma fille Emilie qui a réalisé toutes les photos de l'initiation à la broderie Hardanger... mes 2 mains ne suffisaient pas !

Ici, s'achève ce chapitre norvégien.

Bonne semaine ! 💋